J’ai terminé ma deuxième session comme professeur. Ces 15 dernières semaines sont passées comme un ouragan. Vites et mouvementées. Un marathon en accéléré. Stress. Cours à monter. Stress. Cours à donner. Stress. Recommencer. Stress. Croire que ça n’aura jamais de fin. Ouf ! Je termine les yeux cernés ne pensant qu’une chose, vider mon cerveau sur mon oreiller.
Il y avait longtemps que je voulais enseigner. Dans ma carrière, j’ai monté et donné plusieurs formations pour les adultes sur divers sujets. J’aimais beaucoup cela. Avoir le sentiment de contribuer à l’évolution, ne serait-ce qu’une infime partie, d’idées, me plaisait bien. Je ne le savais pas encore mais les adultes sont relativement faciles à former. Tout d’abord, ce qu’on leur raconte se raccroche souvent à un ou des événements vécus. Ainsi, ils accrochent tes informations à des éléments de vie. Et les adultes ne dorment pas sur leur bureau. Les adultes ont pitié de toi, pauvre formatrice, lorsque ça ne va pas bien. Ils t’encouragent en te souriant même lorsqu’ils s’ennuient. Et à la fin de la journée, les évaluations sont bonnes soit parce qu’ils ont réellement apprécié ou encore parce qu’ils apprécient que la journée se termine ! Alors enseigner à des jeunes adultes, je me disais " Ça ne peut pas être si terrible que ça ! ".
Enseigner me semblait une suite logique de ce que j’avais réalisé jusqu’à maintenant. J’ai donc fait parvenir mon curriculum, décroché une entrevue (en fait 3 entrevues dans 3 écoles différentes) et je me suis lancée dans l’aventure. Une aventure, ça oui. Puisque c’est un peu comme se lancer dans le vide en espérant que la corde à tes pieds soit attachée bien solidement. J’ai laissé mon emploi pour de probables tâches en espérant que d’une session à l’autre il se passe quelque chose. J’étais positive et je le suis encore. J’assume. C’est vraiment ce que je voulais faire.
Mon premier geste a été d’essayer de comprendre la matière du cours qu’on m’avait remise. Un amoncellement de mots. Le langage scolaire. Celui-ci ne m’était plus familier depuis longtemps. J’avais l’été pour le déchiffrer. Je m’installai donc en bord de mer avec mes livres et mes cahiers sur ma chaise longue et ma table à pique nique. Je me voulais en vacances dans un décor idyllique. Je programmai mon esprit pour qu’il soit persuadé d’être en vacances malgré le travail qui m’attendait. Je réalisais alors que je renvoyais à mes voisins de camping une image plutôt bizarre. Dois-je faire le lien entre cette image de moi et le fait qu’ils ne m’adressèrent jamais la parole malgré la grande fraternité qui règne entre les habitants de la planète camping ? Fort probablement. Une fois, j’entendis même une vieille femme dire à son mari " Mais oui ! c’est elle, celle qui est toute seule dans sa tente… ". Une femme seule qui fait du camping c’est déjà un peu étrange mais en plus elle travaille ! Bizarroïde … Ça y est, je figurais sur la liste de la folle du village du camping. Mais bon, je n’y étais que pour quelques jours. Après, je ferais probablement partie des histoires de vacances de ces gens. " Te souviens-tu la femme là bizarre, oui oui, elle avait un regard toujours vague perdu dans le vide de l’océan, un peu étrange… et bla et bla et bla. ". Mais qu’importe, si je peux servir à divertir, j’en suis fort aise.
J’étais dans ce camping parce qu’il n’y avait plus de places dans le parc national tout près. Je vécu la frénésie de l’arrivée de la Mmmajestueuse roulotte… une Mmmerveille technologique … qui me cacherait l’océan pendant au moins 12 heures, le temps de tout démonter et de faire la place à une autre Mmmerveille. Mais avant de repartir, le monsieur, appelons-le Turcotte, je ne dois pas être très loin puisque les Turcotte sont relativement nombreux ici, sa femme, sa fille et son petit frère s’installaient près de moi sur un lopin de terre... Et comme j’étais pas là ha ha, le petit monsieur a dit hi hi, puisque c’est comme ça nous jouirons de sa vue sur l’océan
… bon, suffit.
Alors je regardais la Merveille technologique se mettre à niveau avec la terre par le biais d’un espèce de tuyau programmé électroniquement pour sortir du dessous de la chose pour rejoindre la terre qui elle s’alignait parfaitement avec la Merveille. Enfin, mon explication n’égale en rien mon étonnement pour ce spectacle. Ainsi, toute la famille, disons toujours Turcotte, dormirait Merveilleusement droit dans la Merveille et ce, où qu’ils aillent. Moi qui devait me coucher en étoile dans le fond de ma tente pour voir si ma position par rapport au sol était acceptable, je réalisais à quel point ma vie de campeuse manquait d’éclat. Pourquoi en étoile me demanderez-vous ? Aucune idée. Je fais ça. Je m’installe et je tente de toucher au plus grand volume de plancher de tente qui soit. Peut-être suis-je extrêmement prudente et aligne ma tente au cas où je roulerais sur moi-même dans mon sac de couchage.
De plus, en lieu et place du réfrigérateur, j’avais une glacière dans laquelle je devais retirer des aliments gorgés d’eau la moitié du temps… je n’avais pas de télévision, de radio, de parasoleil qui se déroule tout aussi électroniquement que la mise à niveau ! Ma tente n’avait pas un compartiment chambre à coucher, salon et compartiment bagages. Quelle misère ! Elle était toute simple et n’avait comme accompagnateurs, qu’une chaise longue, une table à pique nique qui plus est ne m’appartient pas et mes livres d’école. Je n’avais pas non plus de faux palmier en plastique qui éclairait le soir avec des lumières de Noël ! Je savais que vous seriez perplexe après cette affirmation. Mais si vous me le demandez, je fais le serment de publier la photo du palmier et d’écrire sur les palmiers de Noël dans un futur article ! En fait, c’est tout un spectacle pour une apprentie comme moi de se retrouver sur un tel terrain pour des vacances….
La vue, une fois traversée les 4 rangées de roulottes et la rangée de chalets qui bordaient l’océan, était tout de même admirable. Ainsi, l’essentiel dans toute cette histoire était que je me puisse me croire en vacances malgré le travail de préparation de cours qui m’attendait. Malheureusement, cette croyance fût de courte durée. Il me fallut plusieurs heures pour commencer à comprendre la structure de mon cours, les thèmes abordés, les repérer dans mes livres de référence. Je m’installais bien chaque matin aussi confortablement que possible dans ma chaise longue mais au lieu de me détendre, lorsque je regardais le travail que j’avais à réaliser, le bas de mon dos réagissait violemment m’envoyant le message tendu : " Tu n’y arriveras pas ! Bou hou ! ". Je comprenais alors pourquoi ce gentil monsieur, qui lui n’est pas un Turcotte, qui m’avait accueilli et remis mes notes de cours m’avait souhaité avec un certain sourire " Bonnes vacances ! ". Il savait ce qui m’attendait. Ce qui attend à chaque nouveau prof. Une tempête de mots qu’il faut tout nettoyer afin que le calme finisse un jour par s’installer dans tes cahiers. Nul besoin de rite d’initiation. La seule préparation de cours suffit à te faire comprendre qui tu es. En fait pas grand chose. Une nouvelle dans un monde de nouveautés.
J’avais beau tenter de me calmer, je savais qu’un jour je me retrouverais devant une classe de 30 jeunes juges en soif d’apprentissage. Et j’allais même les rencontrer très prochainement puisque cet été là, sans que je comprenne pourquoi, fût plus courte que les autres !
2 commentaires:
Pour éviter tout malentendu, le message anonyme provenait de l'auteur du site et disait "Test". Ah !!! Je me réponds toute seule maintenant...
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