Impatiente, le coeur plein d'espoir et surtout d'impatience d'avoir attendu trois longues journées avant de recevoir le résultat de la Senstrifugeuse, qui rappelons-le, doit lui indiquer s'il existe un lien entre les victimes du meurtrier en série qui pose ses questions du lundi matin (Pis qu'essé que t'as fait en fin de semaine ?) ; Cricri Duquesne se dirige allègrement vers le bureau du technicien du labo, informaticien et ancien garagiste, Coucou Charbonneau.
- " Alors " demande-t-elle avec un enthousiame débordant. "Des résultats sont sortis de mes scènes de crimes ?".
- " Qu'est-ce que j'en ai à foutre ? " répond Charbonneau.
- " Euh... pardon ? " fit Cricri interloquée... " Vous m'aviez indiqué de revenir dans trois jours pour le résultat de mes tests. Alors s.v.p. j'aimerais connaître ce qu'il en est précisément. " formula-t-elle, hésitante.
- " VOUS CROYEZ QUE JE SUIS VOTRE BONNICHE ? FOUTEZ-MOI LA PAIX ! AUJOURD'HUI J'AI MON QUOTA DE RÉPONSES DÉJÀ DONNÉES !!!!! " hurle Coucou tout bonnement et semble-t-il à Cricri, gratuitement.
Surprise, décontenancée par tant de colère et d'agressivité, ne comprenant pas ce qui justifie un tel comportement à son égard, Cricri s'en retourne vers son bureau. "Mais qu'est-ce que j'ai dit ? Qu'est-ce que j'ai bien pu faire ? Pourquoi cela m'arrive-t-il ? "
Tant de questions sans réponses. Traumatisée, elle s'assoit devant son ordinateur. " Surtout, ne rien montrer. Garder la tête hors de l'eau. Me concentrer sur mon ordinateur. Faire naître des mots à la place des larmes. Peu importe s'ils ont un sens, les faire défiler pour ne pas m'éclater, m'anéantir. Ne pas me désintégrer dans cet endroit, aujourd'hui, si froid, si impersonnel. Concentre-toi. Concentre-toi. Tu es une femme forte. Il ne t'est rien arrivé, rien qu'un crétin qui t'as gueulé dessus pour rien. Mais pourquoi cela m'affecte-t-il autant ? Pourquoi je ne peux réagir comme les autres, sans y accorder d'importance ? Et pourquoi n'ai-je pas trouvé la force de me défendre ? Non, concentre-toi. Arrête de penser. Tes pensées te conduiront trop vite à ton coeur et là, là, la désintégration de ton être... Serre les dents. Regarde l'écran. Place une pierre au lieu de la boule qui creuse ton coeur. "
Devant de telles réactions de colère et même de violence prétendront certains, Cricri se transformait en un être sans défense aucune. Elle redevenait l'enfant qui faisait tout pour plaire à ce père agressif et jamais satisfait. Réagir à l'agression par la colère, c'était rejeter celui qu'elle avait aimé malgré la violence qu'il lui faisait subir. Se défendre signifiait rejeter l'autre avec la même arme avec laquelle on l'avait agressé pendant des années. Non, rien, devant de tels comportements, elle n'y pouvait rien. Elle n'était qu'une femme handicapée, paralysée et souffrante. Elle ne souhaitait qu'une chose en ce moment, que les heures se déroulent avec l'espoir qu'elles mettraient une distance entre son coeur et cet événement douloureux. Ces interminables heures constituées d'insupportables minutes se déroulant au rythme d'incalculables secondes.
Les heures se succédèrent enfin jusqu'à ce qu'elle puisse finalement quitter ce bureau maudit. Mettre une distance temps entre elle et Charbonneau. Mettre une distance d'espace entre elle et cet événement. Retourner chez soi. Le seul endroit sécure où l'on ne viendrait pas la maltraiter. Ni l'humilier. Se rouler en boules, pleurer, laisser s'épancher la douleur de tant d'années de violence cumulées. Et elle se vautra dans son fauteuil préféré, pleura au son de la voix douce et enveloppante de Bobby Bazzini, espérant que tout cela ne serait bientôt qu'un mauvais rêve. Mais elle savait que le pire viendrait. Elle savait qu'elle retournerait devant cet agresseur, devant camoufler sa douleur, agissant comme s'il ne s'était rien passé alors qu'elle aurait encore longtemps mal à son intégrité non seulement d'avoir été maltraitée mais de concevoir que pour l'autre, il ne s'était en fait rien passé.
À suivre.
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