Bienvenue sur mon blogue de lecture virtuelle !

Pour tout vous dire, je suis une travailleuse sociale qui est devenue enseignante. J'aime écrire. Honnêtement, depuis ses tout débuts, je m'oblige par ce blogue, à écrire et ainsi me maintenir dans un processus de création. Je n'ai pas vraiment d'objectifs autres que d'écrire et de me divertir. J'espère aussi que vous saurez trouver un peu de plaisir à me lire.


Vous êtes invités à échanger vos commentaires.


Alors bonne lecture !

samedi 14 novembre 2009

Le baccalauréat à vaisselle

Ce soir-là, elle pleurait pour la 651 ième fois devant le 1250 ième épisode de cette série, Grey's Anatomy. Comme elle appréciait ces intrigues bien ficelées avec ces personnages si intenses dont les émotions déferlent en rafales sur ses moments de loisirs télé! Ces histoires hospitalières la réconfortaient. Trois années de visites ininterrompues entre ces murs bleu poudre; tant de temps passé, qu'elle en avait découvert le réconfort. Pas de masque, pas de jeu de rôle. Entre ces murs, il était permis d'être. Il était également permis de ne plus être. En ressortir dans un sac. De disparaître. Alors cette émission la touchait, lui rappelait sa mère malade, ses espoirs de guérison jusqu'à son acceptation de partir, réalisant soudain que le combat était vain. Malgré la douleur, cette acceptation, ce lâcher prise avait été une grande leçon dans sa vie et la réconfortait encore, dans les moments pénibles. Cette série réchauffait son coeur et ses longues soirées d'hiver.

Alors qu'elle y prenait cet immense plaisir, elle vivait en même temps, des émotions étranges et intenses. Cette voix intérieure qui la rendait mal à l'aise:

"Voyons donc nounoune, c'est platte c'te connerie d'émission gna gna à l'eau de rose. Pourquoi t'es tout le temps pâmée après cette merde élitiste où les docteurs ne couchent qu'avec des docteurs? Et quand c'est avec des infirmières, ça dure jamais, c'était un passe temps ou une erreur. En plus, pendant qu'ils ont les mains bien enfouies dans des intestins qui pissent le sang, ils pleurent constamment sur leur sort, parlant sans relâche de leur nombril qui tourne autour de leur coeur et de leur cul. Branche-toi donc sur la soirée du hockey, tu vas peut-être apprendre quelque chose d'instructif ! "

Et elle répondait alors à cette voix :

- "Ben oui toé, la soirée du hockey. Grosse soirée intellectuelle en perspectives. Pas de chicanes, pas de sang. Ben différent de Grey's."

C'est alors qu'elle eût une révélation. Non, pas une révélation qui lui disait qu'elle parlait toute seule; ça elle le savait. Elle avait vécu 20 ans en parlant à ses chats, maintenant qu'ils étaient partis, elle ne pouvait plus s'arrêter. L'habitude était là, bien ancrée. Elle règlerait le problème le jour où elle placerait un autre chat devant sa bouche. Elle normaliserait à nouveau ce comportement. Non, cette révélation était autrement plus déconcertante et la clouât d'effroi sur son sofa... ce qui ne fît pas grand différence en apparence puisqu'elle y passait déjà pas mal de temps à regarder toutes ces séries qu'elle adorait. Non, pas ça. Elle réalisait qu'elle avait deux cerveaux en elle qui se parlaient. Un cerveau de gars, cynique, à la parole crue, qui la traitait d'insignifiante et un cerveau de fille, mou, qui pouvait pleurer devant tant d'insignifiances.

Ce soir-là, elle réalisa tout son mal être. Ses deux cerveaux vivaient côte à côte, en parallèle, l'un menant sur l'autre, en alternance, selon les situations rencontrées. Parfois même, ses cerveaux dialoguaient et comme à ce moment-là, elle pouvait passer des soirées seules à vivre un dialogue de couple interne. La seule différence c'est que le cerveau de gars ne pouvait pas se dire " Laisse-la faire, écoute pis ferme ta gueule. Tu vas peut-être avoir du bon sexe après." Non, il ne pouvait même pas se réconforter, parce que le cerveau de fille lisait instantanément dans ses pensées et lui répondait  " Je vais avoir mal à la tête, je vais avoir mal à la tête... gna gna".  

Elle n'aimait pas son cerveau de fille. Exposer sa fragilité, sa vulnérabilité, ressentir la joie et la tristesse et la montrer au grand jour, la terrorisait. Il lui semblait que ses faiblesses mettraient sur sa route des abuseurs et profiteurs de toutes sortes qui la rendraient sûrement malheureuse. En revanche, sans savoir pourquoi, elle appréciait son cerveau de gars et ce, autant qu'elle apprécie les hommes. Ce devait avoir un rapport quelconque avec Freud, le sexe et l'envie du pénible.  Enfin, elle utilisait souvent son cerveau de gars pour ne pas chercher à comprendre.

Ce cerveau était très dur avec elle. Il la traitait d'insignifiante, de grosse, de vieille, de pas assez belle pour être aimée. Elle était souvent exaspérée par ses vacheries, qui d'un autre côté, lui permettaient de se pousser à bout, de courir jusqu'à épuisement pour se maintenir à son meilleur, de faire tout en son possible pour performer dans la vie comme dans son travail. Elle n'était satisfaite que lorsque les exigences de son cerveau de gars étaient atteintes en même temps qu'elle était souvent écoeurée de s'astreindre à ses exigences.

Avec toute cette mécanique qui évoluait gaiement à l'intérieur de son être, il est facile d'imaginer que lorsqu'elle rencontre l'homme de sa vie de quelques mois, il y a comme toujours une personne en trop. Le dernier qu'elle rencontra avait vraiment fière allure, beau, charmant, attentionné. Elle avait fermement cru avoir trouvé la perle avec qui elle partagerait sa vie. Au lieu de quoi, elle avait failli y rester. Cet homme avait un cerveau de fille, un énorme cerveau de Germaine, désirant tout contrôler jusqu'à la façon dont elle lavait sa maudite vaisselle. Le cerveau de gars en elle avait été profondément affecté de ce rival qui violentait le cerveau de fille d'une façon qu'il n'aurait jamais osé malgré l'étendue de son expérience.

Alors ce rival avait osé. Il  lui avait offert un plat à vaisselle, lui donnant une formation élaborée équivalent à un baccalauréat sur l'art de laver la vaisselle; le bac à vaisselle...

"Premièrement, il faut toujours laver la vaisselle, pas juste une fois par semaine. Pas juste quand il n'en reste plus dans les armoires. Tu comprends ? C'est dégueulasse que tu laisses traîner ta vaisselle comme ça sur le comptoir... Et de plus, ta façon de laver n'est pas hygiénique. Laisser couler l'eau chaude pendant que tu prends ta tite lavette avec du savon, ça ne lave pas convenablement. Il faut mettre le tout dans un bac à vaisselle avec de l'eau bien chaude et faire tremper. Comme ça, plus de bactéries. Et tout est propre!"

Alors que son cerveau de gars ne comprenait pas un mot de ce que Germaine lui enseignait, son cerveau de fille en fût terrorisée. "Non!!!! va pas falloir que je lave ma crisse de vaisselle comme ça, à ta façon, toute ma vie! Après ça sera quoi? Une maîtrise sur le lavage du derrière ?"

Ne pouvant en supporter davantage, elle s'enfuit très loin. Voilà pourquoi aujourd'hui, elle vit encore seule, se satisfaisant de cette relation de couple dans sa tête. Une relation à violence contrôlée, à appellation modérée. Et voilà pourquoi, elle est encore si apeurée de voir arriver un autre osti de bac à vaisselle dans sa vie.

Alors aujourd'hui, elle met une annonce sur ce site espérant ainsi passer à une étape plus positive de sa vie :

" Bac à vaisselle à vendre. Peut aussi être échangé contre objet relatant expérience amoureuse merdique . Aucune offre ne sera refusée. "

Alors, à qui la chance ?

6 commentaires:

Terminé a dit…

Dire qu'un lave-vaisselle aurait pu vous sauver... ;-)

Travailleuse sociale a dit…

@Groopie et al... quelle idée... vous seriez pas conseiller matrimonial ? Et comment on sait si on parle à Groopie ou à Mister B ?

Unknown a dit…

Mwahaha, tu m'es encore eu !
Je suis toujours persuadé que c'est une vrai tranche de vie...
à moins que ce soit le cas ?
Combien le bac à vaisselle ?

Travailleuse sociale a dit…

La vérité vraie de vraie, à peine retouchée... un souçon de rouge ici, une trace de bleu par là, mais l'image du fond est vraie de vraie. :o)

Travailleuse sociale a dit…

Donc, le bac à vaisselle... je disais donc que je l'échangerais contre un chat exotique, opéré, dégriffé, stérilisé qui dort la nuit... :o)

Travailleuse sociale a dit…

C'est beau, erreur corrigée, fini de gosser...

BlogueParade.com