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Pour tout vous dire, je suis une travailleuse sociale qui est devenue enseignante. J'aime écrire. Honnêtement, depuis ses tout débuts, je m'oblige par ce blogue, à écrire et ainsi me maintenir dans un processus de création. Je n'ai pas vraiment d'objectifs autres que d'écrire et de me divertir. J'espère aussi que vous saurez trouver un peu de plaisir à me lire.


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samedi 26 juin 2010

Mes vacances à la campagne

Chapitre 2 (suite et fin)

Troisième journée : Achetez local, pensez global

Je me rendis ce matin-là au petit village situé à quelques kilomètres de ma nouvelle et fabuleuse demeure afin de faire mon épicerie. Il faut dire que j’avais terminé depuis belle lurette les deux petits pots de yogourts nature et mon pot d’arachides de 50 mg, destinés à me maintenir en vie jusqu’à ce que je localise l’épicerie la plus près. J’ai repéré, à 5 kilomètres, un petit village et à 10 kilomètres, un moins petit village. Donc, je me rendis à 5 km de chez moi et m’arrêtai au marchand du coin, appelons-le, Unichoix, afin de protéger son anonymat. Je voulais, ma matin-là, faire une bonne action et acheter local. Finies les dépenses folles dans les grandes industries destinées à enrichir des poignées d’américains au détriment de populations mexicaines et autres ! J’étais bien déterminée à faire profiter la population de ce petit village de ma capacité d’achat de touriste; capacité financière tout de même limitée par le fait que mon portefeuille fut presque vidée par la location du chalet. Mais qu’importe, j’étais prête à me ruiner si c’était pour une bonne cause.

Achetez local comporte toutefois quelques inconvénients, vous vous en doutez sûrement. Tout d’abord, on doit se promener parmi des allées bien étroites où la marchandise s’entasse dans un certain désordre tant les cannes sont empilées comme des sardines. Il est alors très important de modifier notre manière de faire l’épicerie. Il faut donc rouler très lentement et rester soigneusement concentrée afin de ne rien manquer. Un malheur est si vite arrivé. Un pas trop rapide, un clignement des yeux et voilà, vous avez loupé le pot de Quik aux fraises. Et comme il vous faut parcourir 10 km aller-retour si vous manquez de quelque produit que ce soit, vous serez ainsi condamné à la privation de ce sirop pour les sept déjeuners à venir, soit le temps convenu et convenable entre deux épiceries. Alors, allez-y gaiement mais également, soigneusement. Je repassai ainsi trois fois devant le comptoir laitier, cherchant désespérément l’endroit où l’on rangeait le yogourt nature. Je me dis que ma méthode de magasinage local n’était pas encore au point, ce qui était tout à fait normal, vu le manque de pratique.

Devant déjà brisé la promesse que je m’étais faite de ne compter que sur moi, je m’enquis.

« Dame Unichoix » dis-je alors timidement, « par un malencontreux coup de ma destinée, je n’arrive pas à trouver le yogourt nature… Je distingue parfaitement le yogourt aux cerises ainsi que le yogourt aux fruits des champs mais la blancheur de ce pot de yogourt nature doit m’éblouir, je n’arrive pas à le localiser sur vos tablettes ! Auriez-vous l’amabilité de me conduire jusqu’à lui ? Je vous en serais éternellement reconnaissante. »

Le fait de ne passer qu’un seul été dans cet endroit, me donnait, me semblai-t-il, la permission de beurrer joyeusement mes demandes.

« Bien voyons, bonne dame » me dit-elle de son charmant accent français, « nous ne vendons pas de yogourt nature, les gens n’en mangent pas. »

« Ben, c’est sûr que si vous en vendez pas, ils en mangeront pas » rétorquais-je avec toute la bonhommie dont j’étais capable. « Vous voyez, je suis le régime de Josée Lavigueur et du yogourt nature, elle en met partout. Alors, ma devise étant « Fais ce que dois », vous comprendrez que je ne puis passer une minute de plus sans yogourt nature ».

« Faudra vous débrouiller autrement. Allez dans le moins petit village, ils en auront probablement. »

Je me butais alors à ma première désillusion. Les gens de la campagne ne sont donc pas tous excessivement généreux ! Moi qui croyais qu’ils étaient tous, sans exception, prêts à se jeter sous le premier train venu si c’était pour nous empêcher d’échapper notre crade d’œufs, mais où étaient donc ces charmants villageois ? Peut-être n’était-ce qu’un coup de malchance qui avait placé sur ma route cette dame française quelque peu bourrue. Entendez-moi, je n’ai absolument rien contre les français. Après tout, ce sont nos ancêtres, nos colonisateurs, le deuxième peuple venus ici conquérir un nouveau territoire en décimant des populations autochtones ou en les sauvant grâce à l’évangélisation et nous abandonnant, l’heure venue, aux mains des Anglais. Je m’étais d’ailleurs laissé dire qu’alors que nous perdions Québec, Lévis avait gagné la bataille à nul autre endroit que Lévis ! Mais aucune aide ne lui vint des mains du roi de France puisque, tout comme moi, il n’avait pas de téléphone, le pauvre, perdu au milieu de nulle part et ne pouvant ni joindre, ni être joint par personne. Détrompez-vous, je n’ai rien contre les français à moins qu’ils ne comptent parmi mes voisins, cependant, je m’égarai ce jour-là dans des pensées indignes, probablement mues par la possibilité de privation de yogourt nature, et me laissai aller de la façon la plus infâme qui soit.

« Va chier, maudite …., c’est fini pour moi acheter local ! M’en vas faire mon marché dans le moins petit village ! ».

J’eus honte de mes propos. Ils m’accompagneront d’ailleurs dans les moments les plus noirs de cet été. Quel malheur ! Ces paroles bien indignes propulsent alors mes pensées dans les plus sombres moments de mon existence et dans tout ce que j’ai pu dire de méchant dans ma vie. Le jour où j’ai dit à ma mère que mon collier de toque ne valait pas de la marde, que son gros toutou rose, elle pouvait bien se le mettre où je pense. Le jour où j’ai dit à ma sœur que c’était juste une grosse. Ah, non, désolez, je ne lui ai pas encore dit, mais à voir la situation évoluée, le jour maudit ne devrait pas trop tarder. Je n’en étais qu’à ma troisième journée de vacances et mon tempérament colérique risquait de tout gâcher, et qui plus est, en ce lieu si formidable qu’est l’épicerie. Il me fallait me ressaisir. Je tenterais de me racheter en allant faire mon marché dans le moins petit village et en fuyant à tout jamais l’Unichoix, qui soit-dit en passant, semblait quelque peu porter son nom.

C’est alors que je découvris, le paradis des produits. Pour les bienfaits de cette histoire anonyme, appelons-le le Wétro Plus. Dans la vie, il existe des Wétro et des Wétro Plus, où il y a simplement, davantage de choix.

N’en déplaisent aux anti-mondialistes, aux environnementalistes et aux globalistes-localistes, je me retrouvai bientôt au pays de l’ordre et du choix. De magnifiques allées remplies à craquer de produits soigneusement rangés. Toute place était parfaitement définie et tout était parfaitement à sa place. Le fait que peu de personnes fréquentent cet endroit désert y est sûrement pour quelque chose, mais jamais je ne me serais doutée qu’un tel endroit existât dans cette campagne ! On y trouvait de tout ! Du sarrasin moulu sur pierre, de la chapelure de riz, de la chapelure de quinoa, du mélange à gaufres sans gluten, du mélange à pain à sandwich, du boudin au lait en canne, moi qui avais passé ma vie à chercher du boudin au lait en canne ! Il y avait même et oui, il y avait même des biscuits de marque « K-toos » sans gluten, sans blé, sans caséine, sans produits laitiers. Des magiciens ! Ces villageois ne pouvaient qu’être des magiciens ! Ils avaient trouvé la recette de biscuits sans ingrédients ! C’est Josée Lavigueur qui serait contente ! À moi les après-midi à me goinfrer dans la boîte de biscuits faits avec rien !

Alors que ma joie était à son paroxysme et que je croyais qu’il fut impossible de ressentir bonheur plus profond, j’arrivai devant la rangée des toasts Melba. Bien sûr, il y avait le modèle traditionnel, mais on y retrouvait également des grosses toasts carrées, des petites rondes, des grosses rondes, des toasts minces mais aussi des épaisses. Rien ne manquait. C’était absolument stupéfiant ! J’imaginais le jour prochain où j’inviterais mes amies pour un party de Melba directement dans l’épicerie. L’atmosphère serait certainement à la réjouissance et l’on se souviendrait sûrement longtemps de cet été là. Je repartis le cœur léger vers ma destination première, le coffre bourré de produits d’épicerie et la tête remplie de souvenirs impérissables.

Arrivée au chalet, je rangeai soigneusement le tout, m’ouvris une bière et m’installai confortablement devant la télé. Une pensée toute simple vint alors à mon esprit.

« Crisse, le yogourt nature… ».

2 commentaires:

ClaudeL a dit…

Si ce n'est pas une nouvelle, en tout cas, la chute est là et j'avais aussi oublié le yogourt.
J'ai tellement reconnu MA campagne.

Travailleuse sociale a dit…

j`ai aussi grandi en campagne. J`avais oublié tout ca, c cédille que je ne trouve pas, mais la mémoire me revient, ah! comme elle me revient rapidement... et je me souviens pourquoi je suis partie de là, un jour.`...:o)

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